Abidjan, 08-07-2020 (AfrikMonde.com) Artiste-peintre de profession, Alfred-SABOUA est venu à ce métier par passion. A Bimbresso, dans la commune de Songon où notre équipe de reportage l’a rencontré, l’artiste explique son parcours artistique, non sans indiquer comment la peinture a eu le dessus sur la drogue. Entretien :
Artiste-peintre de profession, Alfred SABOUA est originaire de l’ouest de la Côte d’Ivoire. Il exerce ce métier depuis environ neuf ans (2011). Non pas par accident, mais par passion. Toutefois, il admet que la peinture n’était pas son ‘’truc’’ Certainement un destin auquel il ne pouvait échapper, d’autant que, ‘’depuis l’école, ce sont les dessins avec le stylo’’, mais aussi parce que son cursus scolaire était parsemé d’embûches. En clair, Alfred n’avait d’autre choix qu’écouter la voix divine, en abandonnant l’école pour la peinture qui le relèvera au public.
« Je suis venu à ce métier par passion parce que, depuis l’école, ce sont les dessins avec le stylo. En classe de première, alors que je passais en terminale, à Ouragahio, les difficultés financières de mes parents, m’ont obligé à arrêter les cours. Mais je ne pensais pas devenir artiste, ce n’était pas mon truc », confie Alfred entre deux soupirs. L’artiste reconnaît n’être pas à sa première tentative. « Je l’avais déjà fait, une fois en classe de quatrième parce que je n’étais pas dans les conditions. J’ai repris le chemin de l’école par la suite et obtenu le Bepc », se satisfait-il, avec un sourire dans le coin des lèvres.
De la drogue, à la peinture
Comme le dit un adage, ‘’nul ne peut échapper à son destin’’. Cette maxime colle bien à la vie professionnelle de l’artiste, même s’il ne s’en n’est pas rendu compte au départ. La situation financière de ses géniteurs donne un coup d’accélérateur à sa destinée. « En classe de première, j’ai récidivé. Ce qui n’a d’ailleurs pas plu à ma famille. Finalement, je me suis retrouvé dans la rue. Livré à moi-même. La famille m’avait abandonné dans la rue. J’étais avec des amis. Je me suis adonné à la drogue. Un mois après, j’ai arrêté la consommation par la grâce de Dieu. En fait, ce n’était pas mon truc », se dévoile-t-il, tout en ravalant ses larmes.
Dans la rue, Alfred s’adonne à toutes sortes de vices notamment à la drogue dont il sera délivré grâce à la puissance divine. D’ami en ami, il trouve enfin gîte et couvert chez un des amis de sa famille biologique, où il participe aux tâches ménagères. Il met ses temps perdus au profit du dessin. Et comme, il le souligne, c’est chez cet ami, que tout est parti !
« A mes temps perdus, je dessinais. C’est étant chez cet ami que tout est parti. Ayant décelé mon talent, les parents me confient à un professeur d’art plastique. Ce dernier me met sur un examen de cinq bristols, sur lequel je devais représenter une île. Je réussis trois bristols. Je me souviens qu’en classe de 1ère, mon professeur m’a surpris en train de reproduire le portrait de ma voisine, mais au lieu d’un blâme il m’a plutôt félicité. Il a dit, Alfred, ta place n’est pas ici. Tu dois aller dans une école d’art », fait-il savoir.
A la question de savoir si l’artiste a fréquenté une école de perfectionnement, il s’est voulu clair : « Je n’ai jamais fréquenté une école de perfectionnement. »
Un contrat de deux millions cinq mille francs CFA payé en « monnaie de singe »
L’artiste soutient posséder plusieurs productions à son actif. Notamment sa première expérience qui était l’hôtel le cottage, à Gagnoa où il a effectué la peinture et la décoration intérieure de 32 chambres. « J’ai fait la peinture en deux mois seulement, et aucune chambre ne ressemblait à l’autre. Le directeur de cet hôtel se nommait Jean Michel Raymond, c’était un Européen à qui je dois beaucoup », se réjouit Alfred. Outre, Jean Michel Raymond, son bienfaiteur, Alfred a eu affaire à des Britanniques ainsi qu’à bien d’autres amoureux de la peinture artistique qui ont apprécié et aimé ses œuvres (Peinture des Hôtels le Fromager et le Cottage). La disparition de Jean Michel Raymond, sera un coup dur pour Alfred qui reconnaît en lui de multiples qualités, même si, le recouvrement de ses fonds n’a pas été fait tel qu’il le souhaitait.
« J’ai un seul hôtel de 32 chambres pour 2 500 000 FCFA, mais j’ai été payé en monnaie de singe. Au finish, le directeur s’est désengagé. Cependant, lui et moi, sommes restés en de bons termes. Il m’a beaucoup appris, beaucoup donné sur le plan professionnel. »
Après les hôtels, Alfred se retrouve avec des marchés, de décorations d’intérieur de domiciles, de bâtiments, des tableaux d’art et des portraits. ‘’Qui veut aller loin ménage sa monture’’, a-t-on coutume de le dire. En effet, l’artiste qui veut aller loin, commercialise ses œuvres en Europe. Toutefois, il ne fait du coût de ses œuvres, une priorité, parce que, confie-t-il, « pour l’heure, je mets l’accent sur ma promo, je veux me faire un nom. Ma correspondante, en Europe et moi, sommes restés dans le domaine religieux. Mes tableaux mettent en exergue des passages bibliques. J’ai juste un peu de soutien pour continuer l’œuvre. Mais avec la situation actuelle due au coronavirus, le projet est en stand bail pour l’heure».
Que de difficultés dans l’exercice de son métier…
« Nous sommes confrontés à de multiples difficultés dans l’exercice de ce métier. Etant dans l’informel, des propriétaires refusent de nous payer, une fois le travail fait. Tous les clients ne respectent pas le contrat, une fois le travail terminé. Finalement, nous nous retrouvons souvent en train de nous bagarrer », regrette-il, avant d’ajouter que le coût de ses œuvres varie de 70 000 FCFA à 200 000 FCFA voire plus, selon les pièces et le bâtiment. Entre autres solutions pour remédier à ce genre de situations, l’artiste envisage de sortir de l’informel en se constituant en entreprise. De fait, il sollicite le soutien des autorités en charge des petites et moyennes entreprises (PME).
« Pour éviter toutes ces situations, je suis en train de me constituer en entreprise au (Cepici). Je conseille ce métier à mes jeunes frères. Que l’Etat m’aide à me restructurer parce que c’est un métier qui ouvre l’esprit. Avec la peinture, l’on peut beaucoup apprendre à la jeunesse ivoirienne », dira-t-il.
Invitant les jeunes à s’adonner à cette activité, Alfred ne manque pas de se convaincre que la peinture nourrit son homme.
Son goût en matière de la gent féminine
« Mon genre de femme, c’est celle qui me comprend, qui m’aime, celle avec qui je me sens comme un gosse, une complice. Pour lui, l’on peut vivre d’amour et d’eau fraiche, car dit-il, l’on ne doit pas confondre l’amour aux moyens financiers. »
Ses mets préférés
« En matière de mets, en bon bété, je préfère le riz avec la sauce graine. Côté mets européens, j’affectionne beaucoup les frites. »
A propos de la gratuité de la Carte nationale d’identité
Alfred « s’explique mal » la non gratuité de cette pièce administrative.
« J’invite la jeunesse ivoirienne à s’enrôler massivement. Concernant la gratuité de la CNI, souhaitée par l’opposition, je pense que c’est tout à fait normal parce que le pouvoir actuel gouverne tout le pays. Et beaucoup d’administrés sont confrontés à de réelles difficultés pécuniaires », rappelle-t-il.
A propos de la libération de Gbagbo
Convaincu de la libération de l’ex président Gbagbo et de son poulain, Blé Goudé, Alfred explique que ces deux politiques ont ‘’toujours œuvré pour la paix’’.
« Je pense que Gbagbo et Blé Goudé seront bientôt libres. Ils ont toujours œuvré pour la paix en Côte d’Ivoire. C’est grâce à Gbagbo qu’Alassane a pu se présenter à la présentielle », fait-il savoir.
Vous avez dit alliance « FPI-PDCI » ?
Pour l’artiste-peintre, « beaucoup parlent d’utopie, mais je crois dur comme fer ». Pour lui, en effet, cette alliance est une sorte de réconciliation entre tous les Ivoiriens.
« L’alliance FPI-PDCI, une façon de dire que les Ivoiriens se retrouvent. C’est la vraie réconciliation entre les Ivoiriens.»
Ce que la représente pour lui
« La mère, comme le souligne LA BIBLE, est un Dieu pour nous. A preuve, les Saintes Écritures disent, ‘’honore ta mère et tout te sera donné sur terre’’ »
Son adresse à la jeunesse
Alfred exhorte la jeunesse à un esprit entrepreneuriat, en s’adonnant, notamment, à la peinture, source d’ouverture d’esprit.
« Que la jeunesse arrête de s’amuser, qu’elle arrête le broutage, surtout le fétichisme pour avoir de l’argent et se lance dans des activités génératrices de revenus », conclut-il.
Propos recueillis par Clarisse GBAKU