Entretien/N’Guessan Thomas (Artiste-peintre) : ‘’Je rêve que nos autorités créent une industrie artistique au profit des artistes’’

Dans l’atelier-maison de l’artiste N’Guessan Thomas …

17-7-2020 (AfrikMonde.com) Passionné de peinture, N’Guessan Thomas n’a pas échappé à son destin. Après des péripéties qui ont jalonné sa vie scolaire, il est aujourd’hui professeur d’Arts plastiques et enseigne son savoir au Lycée scientifique de Yamoussoukro. Au cours d’un entretien dans son atelier-maison, il nous a fait part de son rêve pour la culture en général, mais en particulier pour la peinture.

« Mon rêve c’est que nos autorités contribuent à créer une industrie artistique, afin de permettre aux artistes d’exprimer leur talent. Cela permettra aux Africains de ne pas arriver les mains vides au carrefour du donner et du recevoir, dans le cadre de la globalisation. Ainsi, si nous ne pouvons rien offrir au niveau des sciences et de la technologie, nous aurons au moins à offrir les fruits de nos cultures », a-t-il indiqué.

S’attardant sur son cursus scolaire, l’artiste a noté qu’il a fréquenté le prestigieux Lycée de garçons de Yamoussoukro devenu plus tard Lycée scientifique, où il développait déjà des aptitudes pour le dessin. Toutes choses qui lui ont valu les encouragements de ses amis. Malheureusement, ses parents marquaient une vigoureuse opposition à ce choix. Après l’obtention de son baccalauréat série D, le jeune N’Guessan Thomas est orienté en Pharmacie.

Commencent alors des difficultés pour faire face à l’achat de documents extrêmement coûteux, alors que les modestes moyens des parents ne pouvaient pas venir à bout de ces besoins indispensables pour des études universitaires. « Je me suis résolu à présenter le concours d’entrée à l’école des beaux-arts, où j’ai pu bénéficier de la bourse pour faire face à tous mes besoins en termes de documents. Cela m’a permis de supporter et terminer mes études de 1984 à 1989 », rappelle-t-il.

(…), l’on est immédiatement capté par la qualité de ses œuvres, …

LES ANNEES DE FORMATION A L’ECOLE DES BEAUX-ARTS. « Je m’en vais vous dire que dans tout mon parcours scolaire, c’est au supérieur et à l’école des beaux-arts que j’ai véritablement brillé. Cette école m’a permis de développer mes talents picturales. Comprenez qu’en première année j’effectuais avec succès les travaux exécutés par les étudiants de 5e année. C’était un véritable tremplin qui m’a permis d’exceller et de développer mon don pour la peinture. Les études se sont déroulées dans de meilleures conditions, jusqu’à l’obtention de mon diplôme en 1989 », confie N’Guessan Thomas.

Cependant, au niveau des rapports avec les enseignants, le jeune étudiant a connu des déceptions. L’attitude de certains encadreurs frisaient la jalousie. Voilà une école où être doué n’était pas un gage d’obtention du diplôme. Là-bas, les formateurs avaient tendance à briser les super doués qu’ils voyaient plutôt en concurrents. « Quant à moi, j’ai dû mon salut au Directeur de l’institut Goethe d’alors qui m’a permis d’échapper à ce traquenard », révèle-t-il.

Evidemment, l’attitude de jalousie était d’autant plus développée que, l’artiste en herbe avait le privilège de terminer les peintures entamées par le célèbre peintre Samir Zarour. Aux yeux de ses formateurs, il était le concurrent idéal à abattre. C’est ainsi qu’à l’examen pour le diplôme, il lui a été attribué des notes farfelues qui ne reflétaient pas ses talents. La providence a voulu que cela se passe devant le Directeur de l’institut Goethe qui a tapé du poing sur la table et a permis de rétablir l’ordre des choses avec des notes à la hauteur de ses talents.

(…) ainsi que l’expression de la beauté et les thèmes que chacune d’elles dégagent.

L’EXPRESSION DU TALENT DE N’GUESSAN THOMAS. Spécialisé, contre son gré, en portrait depuis l’école des beaux-arts, où le Directeur de cet établissement l’obligeait à peindre des portraits pour lui, l’artiste explique qu’il n’a pas besoin de commandes pour réaliser ses tableaux. Mieux, il avoue que ses œuvres sont le fruit de sa grande passion pour la peinture. Certes, ses commandes sont peu nombreuses et se comptent seulement au sein d’une élite en provenance de l’Europe, il trouve toujours du temps entre ses moments de cours, pour satisfaire sa passion.

Avouant partager des rapports francs et bons avec ses élèves qui lui rendent bien la monnaie, N’Guessan Thomas refuse de tremper dans l’acculturation de ses collègues professeurs d’Arts plastiques. A juste titre, il ne rate aucune occasion pour se cultiver au plan général, mais surtout en peinture. Au point où il est snobé comme l’intellectuel parmi ceux-ci. Qu’à cela ne tienne ! L’artiste jette un regard très critique sur l’art en Côte d’Ivoire.

« De plus en plus, le niveau de l’art est en baisse en Côte d’Ivoire. Chez nous les B A BA de l’art contemporain sont foulés au pied. Les artistes ont un sérieux problème avec la composition et ont du mal à créer les différentes harmonies de couleur. Pis, ils peinent à créer les différents contrastes. Pour moi, ces artistes s’adonnent plutôt au badigeonnage qu’à la peinture véritable », regrette-t-il.

Réalisé par Elvire Traoré

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