Présidentielle 2020 : en Côte d’Ivoire, KKB « l’accompagnateur du candidat du RHDP »

Abidjan, 16-10-2020 (AfrikMonde.com) À Barthelemy Zouzoua Inabo : #ElectionTour. Démarrage au diesel au deuxième jour de la campagne électorale. Les affiches des candidats apparaissent dans la ville. Pour le moment, seul le candidat du Parti présidentiel est présent. Le candidat Kouadio Konan Bertin attend d’entrée en scène. Il était ce jeudi 15 octobre 2020, à la primature pour une réunion qui était censée relancer le dialogue politique entre le pouvoir et les candidats à la présidentielle. La veille, il n’avait pu honorer un rendez-vous avec la presse en raison d’un malaise…

Kouadio Konan Bertin (KKB), l’enfant terrible du PDCI-RDA

L’image que je garde de l’homme Kouadio Konan Bertin ? Garçon téméraire, déterminé, engagé. En 2000, après le coup d’Etat de décembre 1999, les militaires régentent tout. Le président Henri Konan Bédié a quitté le pays. Le PDCI-RDA est à la croisée des chemins. Le parti a toujours connu le pouvoir, le tapis rouge. Certains caciques gouttent à l’indignité de la prison.

Une conviction établie

À la veille des élections en octobre 2000, le chef de la Junte au pouvoir, le Général Guei Robert décide de se porter candidat. L’auteur du « bon ton » puise à l’intérieur du vieux parti. « Il est aussi fils du président Felix Houphouët Boigny », justifient certains cadres du parti du père fondateur pour soutenir la candidature de l’ancien chef d’Etat-major de l’Armée nationale. « L’ère de Henri Konan Bédié est finie… », disent d’autres. C’est alors que le président des jeunes du PDCI se révèle une carapace de convictions : pas question de brader le PDCI-RDA. À cette époque, « les jeunes gens » sont partout et nulle part. Il faut avoir le courage d’affirmer son opinion et sa position. Grâce à l’engagement de Kouadio Konan Bertin et certains de ses amis, notamment, Gnamien Yao, le président Henri Konan Bédié ne sera pas exécuté sur l’autel des ambitions des uns, des peurs des autres et des intérêts des habitués aux lambris dorés.

« Au plan sécuritaire, le gouvernement a prorogé jusqu’au 1er novembre 2020, la mesure de suspension des marches, sit-in et autres manifestations sur la voie publique. Signes visibles d’une élection sous tension »

Tentative de parricide

KKB, l’éternel président des jeunes est de tous les combats de son parti. Curieusement, après la crise post-électorale en 2011, Kouadio Konan Bertin sent ses épaules suffisamment fortes et solides pour viser le poste du président de son parti au 12e congrès ordinaire en 2013. Il s’oppose au père dont il a âprement défendu l’honneur quelques années plus tôt. Dans les cercles PDCI-RDA, les anciens rient sous cape. Il n’ira pas bien loin mais il aura montré son ambition.

KKB, frondeur

En septembre 2014, Le président Henri Konan Bédié et le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, signent dans la ville natale du président du PDCI-RDA, l’appel de Daoukro. Il stipule que le PDCI-RDA renonce à présenter un candidat à la présidentielle de 2015 et soutient la candidature d’Alassane Ouattara. Si beaucoup apprécient cet accord politique qui consolide la bonne entente entre les partis membres du groupement au pouvoir, certains cadres du PDCI-RDA s’en offusquent. Au nombre de ceux-ci, KKB. « Ce qui va se passer au congrès, avec la validation de l’Appel de Daoukro, ce n’est rien d’autre qu’un départ de Bédié et de ses suiveurs vers le RDR d’Alassane Ouattara. Il y a dorénavant deux PDCI, un PDCI-RDA et un PDCI-RDR », fulmine-t-il.

Candidat à la présidentielle de 2015

C’est sans surprise que l’enfant terrible du PDCI-RDA se porte candidat à la présidence de la République en 2015. Il n’acceptait pas l’effacement de son parti au profit du RDR. L’opinion nationale et internationale découvre alors un homme à la prose coulante, dont le timbre vocal s’apparente à celui du président Felix Houphouët Boigny. Mais novice en matière économique surtout, il s’embrouille terriblement sur ce qui constitue son projet économique-phare : la valorisation de l’Attieké. Plat national ivoirien à base du manioc. L’Attiéké est resté au travers de la gorge du candidat KKB. Pas sûr qu’il avait bien étudié le projet à l’époque. Sûr que cette année, il saura bien l’expliquer.

Une expérience pas reluisante avec seulement 3,88 % des suffrages. Mais il s’en était plutôt bien tiré au plan financier : le gouvernement avait mis à la disposition de chaque candidat, la somme de 100 millions FCFA.

2020, retour sur scène                          

En 2015, Le PDCI-RDA n’avait pas présenté de candidat. Cela avait irrité les militants. Et beaucoup avaient compris la candidature de KKB comme celle du refus de voir le vieux parti disparaître. En 2020, la donne a changé. Le président Henri Konan Bédié a été désigné par le congrès pour porter les couleurs du parti des indépendances. N’empêche, KKB a décidé de s’engager dans la compétition. Sa candidature a été validée par le Conseil constitutionnel.

Son projet de société est tiré à grands traits, somme de bonnes intentions. Il a besoin de le documenter. Sûrement, à l’occasion du lancement officiel de sa campagne pour la présidentielle à Divo, dans le Lôh Djiboua. KKB est considéré par l’opinion publique comme « l’accompagnateur du candidat du RHDP ». À lui de faire mentir tous ses détracteurs. Pendant les 15 ! Jours de campagne.

Encadré/ Processus électoral : Henri Konan Bédié et Affi N’guessan ne se sentent pas concernés

Grosse déception à la primature, ce jeudi 15 octobre 2020. Le Premier ministre Hamed Bakayoko avait fondé beaucoup d’espoirs sur la rencontre avec les candidats retenus pour la présidentielle du 31 octobre 2020. La veille, certains proches du Premier ministre l’avaient assuré de la disponibilité du président du FPI à reprendre sa place dans le processus électoral. Le président de l’AFD, Pascal Affi N’guessan, attendu à cette rencontre, qui avait été placée sous le signe de la relance du dialogue politique, s’est rétracté à 15 mn de la réunion.

Finalement, c’est du siège du PDCi-RDA à Cocody qu’il a envoyé un message au gouvernement : Henri Konan Bédié et lui-même ne se sentent pas concernés par le processus électoral en cours. Ils appellent leurs militants « à empêcher la tenue de toute opération liée au scrutin et à mettre en application le mot d’ordre de boycott actif par tous moyens légaux à leur disposition ».

Question, par quels moyens légaux met-on en œuvre le boycott actif ? Là est toute la question.

La Côte d’Ivoire a connu le boycott actif en 1995. Le FPI et le RDR étaient alors opposés au PDCI de Henri Konan Bédié. Aujourd’hui, le FPI et le PDCI s’opposent au RHDP de Alassane Ouattara.

Sur le terrain, des mouvements de protestation sporadiques ont été constatés. Des troncs d’arbres ont obstrué certaines voies à l’intérieur du pays.

Au plan diplomatique, le président du GPS Soro Guillaume a pris ses quartiers à Bruxelles. Séance de travail, interviews, déjeuner… Pendant ce temps, le représentant de la Côte d’Ivoire auprès de l’UE, Abou Dosso est à Abidjan. Il est venu rendre compte des relations entre l’UE et la Côte d’Ivoire au chef de l’Etat.

Au plan sécuritaire, le gouvernement a prorogé jusqu’au 1er novembre 2020, la mesure de suspension des marches, sit-in et autres manifestations sur la voie publique.

Signes visibles d’une élection sous tension.

Par Fernand Dédeh, Journaliste indépendant