Côte d’Ivoire/Grand-Bassam : les populations du village de Vitré 2 exigent l’Arrêté préfectoral de leur nouveau chef

  • Des risques d’affrontement à l’horizon
Le nouveau chef de Vitré 2, Sa Majesté Brémi Ago Noel, proviseur de Lycée de son état, en qui les populations disent se reconnaitre désormais.

Des personnalités coutumières de Vitré 2, dans la Sous-préfecture de Grand-Bassam, notables et jeunes avec à leur tête leur président, notamment l’honorable Christophe Tacki, doyen des Notables, porte-canne et régent du siège, l’honorable et chef suprême de la Génération Bloussoué Kotcha Vangah Moïse, le Président des jeunes Kouassi Aké Alain, se sont réunis le vendredi 17 Septembre 2021, au domicile du chef suprême de la génération Bloussoué au pouvoir, pour se prononcer sur les pratiques de leur ex-chef, Nanan Essy Laurent, qu’ils accusent de saper les bases du développement et de la cohésion sociale de leur village. Et pour cause :

Un lotissement de plus de 212 hectares, patrimoine d’un collectif de propriétaires fonciers issus d’une trentaine de familles, pour lesquels le chef refuse de signer des attestations villageoises en vue la sécurisation et de l’acquisition en pleine propriété ; Assignation en justice des délégués de ces familles, pour faux et usage de faux qui s’est soldée par une défaite du chef plaignant ; Opposition au dragage du sable de lagune du village, pourvoyeur d’emplois pour les jeunes et de matériaux de construction pour la mise en valeur des lots du nouveau lotissement ; Bastonnades systématiques d’opposants aux décisions solitaires du chef par des hommes en armes venus d’outres contrées, avec souvent des blessés graves ; Formation d’une notabilité parallèle non représentative des lignées familiales, tels sont, entre autres, quelques griefs que les personnalités traditionnelles présentes à la réunion portent contre leur ex-chef. Qui plus est ‘’a été destitué par décision de la notabilité depuis le 17 novembre 2018, avec le retrait de tous ses attributs de chef, et remplacé depuis lors par l’Honorable Brémi Ago Noël, son adjoint, notable représentant d’une famille, selon nos us et coutumes’’, disent-ils.

Plusieurs manquements graves dénoncés

Pour les grognons, qui se réclament de la grande majorité des populations, plusieurs manquements graves à la bonne gouvernance en pays Bétibé sont à l’actif de Sa Majesté Essy Laurent.  ‘’Il se trouve que depuis plus d’une décennie, constatent les notables, une crise de confiance persiste entre eux et le chef, Sa Majesté Essy Laurent. Il prétexte ne pas reconnaître leur autorité, encore moins celle du chef de terre, l’Honorable Ollo Guy Camille. Ce dernier est pourtant le dépositaire du patrimoine traditionnel, foncier, social, culturel et cultuel du peuple Bétibé de Vitré 2 (…) Les notables constatent avec tristesse que celui qui est sensé incarner l’unité du village les a écartés, sans motif, de la gestion et de la conduite des affaires, contrairement à ses prédécesseurs, notamment Sa Majesté feu Eyimin Timothée. Il a plutôt créé une notabilité parallèle, composée de quelques cadres, dont le plus en vue est le nommé : YOBOU ROBERT, avec lesquels il règne sur le village, faisant ainsi fi des us et coutumes de notre communauté, et prenant des décisions impopulaires’’, lui reprochent-ils.

Après avoir traduit en justice les responsables du collectif des propriétaires terriens coutumiers Sa Majesté Essy Laurent a a été débouté

Dans cette logique, continuent-ils, ‘‘il dénie le droit de propriété foncière coutumière aux familles et refuse de leur délivrer les attestations conséquentes pour la sécurisation de leurs parcelles, sous prétexte que dans notre culture, aucune famille ne possède de terre en propre. Selon lui, toutes les parcelles formant la circonscription territoriale du village sont communautaires et qu’il peut en disposer selon son pouvoir discrétionnaire. Ce qui n’est pas juste, dans la mesure où il existe effectivement des terres rurales appartenant à la communauté, mais il existe également des terres appartenant aux familles, qu’elles ont héritées par voie successorale de leurs ancêtres (…) Sa Majesté Essy Laurent a traduit en justice les responsables du Collectif des propriétaires terriens coutumiers, y compris le chef de terre d’alors, feu l’Honorable Ehouman Kouassi Ferdinand, pour avoir engagé un projet de lotissement sur leurs patrimoines fonciers d’une superficie globale de 212 hectares. Fort heureusement, il a été débouté de son action, ce qui veut dire que l’Etat reconnaît le bienfondé de la démarche des accusés (…) Alors qu’il continue de dénier aux familles le droit de sécuriser leurs patrimoines fonciers en refusant de leur délivrer des attestations de propriété foncière coutumière, les notables constatent qu’il en délivre à certains opérateurs dont un certain M Seydou, en vue de l’aménagement du site dénommé «catapila, pour une superficie de 34 hectares’’, pestent-ils.

Les manquements du chef Essy Laurent jugés assez graves

En vue de rétablir la cohésion au sein de la communauté, un rapprochement a été tenté à l’initiative du Sénateur Ollo Anouman Germain, Monsieur Assamoi Thomas et certains cadres du village pour une réconciliation, début septembre 2018, selon les notables. Toutefois, Sa Majesté Essy Laurent est accusé d’user du dilatoire avec les notables avec qui il avait pourtant accepté de collaborer désormais. ‘’… Les notables constatent que ce dernier use de moyens dilatoires, les nargue et, de manière arrogante, opère des diversions pour éviter de s’exécuter. Il prend les notables comme des bons à rien. C’est donc à leur corps défendant que les notables constatent que ce chef n’est pas disposé à s’engager. Les notables rappellent que chez le peuple Bétibé, les notables sont les représentants des différentes familles. Ils sont donc inamovibles. Ce sont eux qui, collégialement, prennent les décisions qui engagent le village et les soumettent au chef, qui les entérine, et non le contraire. Les manquements du chef Essy Laurent vis-à-vis de l’ensemble des membres du Conseil de la chefferie, ainsi que de celui du développement et de la sécurité sont jugés assez graves’’, ont-ils constaté.

Ce sont ces différentes raisons qui ont emmené les populations à le démettre, et à le remplacer par son adjoint Brémi Ago Noël, Proviseur de Lycée de son état.  A les en croire, celui-ci a été  investi avec faste il y a quelques années en arrière, selon les us et coutumes : un rameau de palmier ayant été noué à sa cheville gauche par le chef de terre.

Malheureusement, il n’a encore pas pu obtenir l’Arrêté préfectoral de sa nomination, celui du chef sortant étant encore en cours. ‘’Essy Laurent a la légalité avec lui, avec son Arrêté, mais il n’a plus la légitimité chez nous. Il est obligé de vivre à Abidjan, et pour ses rares apparitions au village, il est obligé de se faire accompagner par des membres de sa famille qui sont membres des Forces de défense et de sécurité. Ces derniers sont obligés de sortir leurs armes de dotation pour museler les nombreux contestataires qui le conspuent. C’est pourquoi nous exigeons de l’administration qu’elle délivre au plus tôt l’Arrêté de nomination du chef que nous nous sommes donné librement, et qui joue son rôle’’, avertissent-ils.

La réaction du camp du chef destitué

Lundi 20 septembre, aux environs de midi, joint au téléphone afin de donner leur version, Dr Yobou Robert, Gérant-Manager d’une entreprise de la place, et se disant Secrétaire général du village a dit qu’étant donné que l’affaire était en règlement pacifique, il n’était pas bon d’en faire échos dans la presse, menaçant même votre serviteur de subir les conséquences de tels écrits. ‘’Je donne votre numéro de téléphone à Mme le Sous-préfet de Grand-Bassam qui vous donnera la confirmation de ce que je vous dis. Ce sont des affaires anciennes qu’évoquent nos adversaires’’, a-t-il conclu. Nous avons attendu toute la journée de ce lundi.

Une correspondance particulière de Laurent Nahounou

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